La campagne des élections législatives du 28 avril s’est achevée vendredi soir. À Cotonou, en l’absence de l’opposition, la mobilisation n’a pas été au rendez-vous.
« Union progressiste : victoire ! », reprennent timidement quelques centaines de militants installés sur une place ensablée du quartier Xwalcodji-plage, dans la 15e circonscription électorale de Cotonou. Il vient de pleuvoir et le ciel est encore menaçant.
Face à eux, Delonix Kogblevi, la tête de liste de l’Union progressiste (UP), l’un des deux partis autorisés à participer aux élections législatives du 28 avril, tente d’haranguer la maigre foule. Ce vendredi 26 avril marque pourtant le dernier jour de la campagne. Traditionnellement à Cotonou, de grandes caravanes paradent dans toute la ville. Mais cette année, les défilés se seront fait plus discrets et n’auront pas mobilisé les foules habituelles.
À Cotonou, divisée en deux circonscriptions, neuf sièges de députés sont en jeu. Sur le terrain, pendant la campagne, la compétition entre l’Union progressiste et le Bloc républicain – ces deux nouveaux partis issus de la mouvance présidentielle -, s’est déroulée dans une ambiance bon enfant.
« La loi, c’est la loi »
Assis sur son scooter, Maxime assiste sans grand enthousiasme au meeting de son candidat, Delonix Kogblevi, un ancien de la Renaissance Bénin (RB). « Par rapport aux dernières élections, il n’y a pas vraiment de mobilisation. D’habitude, on voit les militants sortir, manifester leur joie. Cette année, les gens viennent plus par curiosité, sans grand engouement », concède ce décorateur aux cheveux grisonnants d’une cinquantaine d’années.
Jacques se joint à la conversation. Dans son imper rouge, il dit regretter la non-participation de l’opposition, mais défend la ligne de Patrice Talon. « Lorsque la loi sur les partis a été votée à l’Assemblée, tous les députés ont voté favorablement à l’exception d’un. L’opposition était donc favorable. Elle avait six mois pour se conformer. La loi, c’est la loi », estime-t-il.
Ce vendredi à Cotonou, l’opposition a fait profil bas. Ses dernières tentatives d’exprimer son mécontentement ont été tuées dans l’œuf. « Nous sommes traqués, certains de nos coordonnateurs ont été arrêtés », affirme l’un de ses leaders.
« La vague d’arrestations et de détentions qui ne fait que prendre de l’ampleur au Bénin suscite de vives inquiétudes, en particulier dans un contexte d’élections », a déclaré Amnesty International, le 26 avril dans un communiqué. L’organisation évoque la repression de trois « manifestations pacifiques » lors desquelles « les militaires et les policiers déployés portaient des armes à feux ».
Le 19 avril, une marche organisée par les anciens présidents Nicéphore Soglo et Thomas Boni Yayi avait été très rapidement réprimée par la police. Yayi a ensuite adressé une lettre ouverte au président Talon avant, selon nos informations, de quitter le pays pour le Nigeria. Il s’y trouvait encore samedi matin. Ses proches ne savaient pas s’il serait de retour au Bénin le jour du scrutin.
Appel au boycott
Silencieuse pendant plusieurs jours, à la recherche de la bonne stratégie, l’opposition s’est-elle résignée à voir l’élection se tenir sans elle ? Tentera-t-elle de la perturber dimanche ? Vendredi, les Forces cauris pour un Bénin émergent (FCBE, le parti de Yayi), et l’Union sociale et libérale (USL) de Sébastien Ajavon, en exil en France, ont appelé les électeurs au boycott.
Dénonçant un « coup de force institutionnel », Joël Ajavon, le frère du chef de l’USL, a également appelé « toutes les institutions, tous les corps d’État et chaque citoyen à faire rétablir sans délai l’ordre constitutionnel ». Et de leur côté, les FCBE ont encouragé leurs « militants, sympathisants et tout le peuple béninois à poursuivre la résistance par tous les moyens légaux ».
Le même jour, des incidents ont eu lieu dans la commune de Tchaourou, le fief de Yayi dans le Nord. Un véhicule de la police a été détruit. Quelques heures plus tôt, le directeur de la police républicaine, le général Nazaire Hounnonkpè, avait tenu à rassurer que la sécurité du scrutin serait garantie, appelant les électeurs à voter dans le calme.
Jeuneafrique