La Guinée, un pays riche en ressources naturelles, se trouve aujourd’hui confrontée à une crise persistante de mauvaise gestion des fonds publics. Dans un contexte où l’espoir d’un avenir meilleur est toujours présent dans les discours officiels, les pratiques de détournement de fonds publics sont devenues un fléau qui semble bien ancré dans les rouages de l’administration guinéenne. Ce phénomène, loin d’être une exception, semble être devenu une norme, affectant gravement le développement du pays.
Le détournement des ressources publiques par les élites dirigeantes et des fonctionnaires corrompus compromet gravement les efforts pour améliorer les conditions de vie des Guinéens. Des milliards de francs guinéens disparaissent chaque année dans les poches de ceux censés gérer ces ressources pour le bien-être de la population. Ces détournements, loin de concerner seulement quelques individus, impliquent souvent des réseaux bien organisés, allant des ministères aux institutions publiques, en passant par des entreprises publiques et des projets internationaux.
Le cas des sociétés d’État, souvent cité dans les rapports de la Cour des Comptes et d’autres institutions de contrôle, est particulièrement révélateur. Les détournements dans des secteurs clés comme l’énergie, les infrastructures et l’agriculture, ont non seulement des répercussions sur l’économie mais privent aussi des générations entières d’un avenir prometteur. Par exemple, des projets censés améliorer la vie des citoyens sont souvent lancés, mais une fois les fonds débloqués, une partie substantielle de ceux-ci disparaît avant même qu’ils ne se concrétisent sur le terrain.
Ce phénomène de détournement a des conséquences dramatiques. Il entraîne la paralysie des services publics, avec des hôpitaux sous-équipés, des écoles manquant de ressources et des infrastructures dégradées. Le citoyen lambda, qui est censé bénéficier de ces investissements publics, se retrouve sans services de qualité et dans une situation de précarité croissante. Cette situation nourrit la méfiance et la frustration populaire envers les institutions et les autorités.
Il est crucial de souligner que ces détournements ne sont pas seulement le fait de petits fonctionnaires, mais souvent des actes orchestrés par des individus occupant des positions de pouvoir. Parfois, les détournements se font de manière aussi subtile que les surfacturations, les fausses factures et la manipulation des marchés publics. Le manque de contrôle et de transparence facilite ces abus, renforçant le sentiment d’impunité parmi les responsables.
La lutte contre la corruption et les détournements en Guinée doit devenir une priorité nationale. Cela passe par des réformes profondes, à la fois judiciaires et administratives, mais aussi par une volonté politique forte d’agir au-delà des discours. La transparence dans la gestion des ressources publiques est essentielle pour restaurer la confiance des citoyens et garantir un développement inclusif et durable.
Le rôle des institutions de contrôle, telles que la Cour des Comptes et les services de l’Inspection Générale d’État, doit être renforcé. Cependant, ces institutions doivent aussi bénéficier de l’indépendance nécessaire pour effectuer leur travail sans pressions politiques. Parallèlement, la société civile, les médias et les citoyens doivent jouer un rôle actif dans la dénonciation des abus et la promotion de la transparence.
Pour finir, la Guinée a les moyens de sortir de ce cercle vicieux de détournement et de corruption, mais cela nécessitera un changement de mentalité à tous les niveaux de la société. Il est grand temps de mettre un terme à ce fléau, pour le bien des générations futures et pour garantir que les ressources de ce pays soient utilisées au service de tous les Guinéens et non au profit de quelques-uns.
Eugène Capi Balamou, journaliste et Analyse juridique.